III. LES SIGNES EXTERIEURS D’ETUDIANTS

Dans l’imagerie d’Epinal, l’étudiant porte la barbe, tient une canne et fume la pipe. Parfois, un béret noir, doté d’un ruban circulaire coloré, le coiffe. Toute une symbolique accompagne ce couvre-chef. D’autres signes distinctifs existent, issus de temps plus ou moins anciens et attachés à l’étudiant et à son Association Générale : le drapeau et les écharpes.

A. Le béret ou la faluche

S’il est un attribut caractéristique et distinctif de l’étudiant français, il s’agit sans conteste de son béret de velours noir. L’origine de ce couvre-chef estudiantin remonte à juin 1888. Cette année là, une petite délégation française se rend à Bologne pour une rencontre internationale d’étudiants. Elle en rapporte le béret noir de la région. Immédiatement adopté à Paris, il va se répandre dans toutes les villes universitaires de France. A Rennes, un document exceptionnel atteste de l’existence du béret étudiant, sept mois seulement après Bologne. Il s’agit d’un rapport de police [1] relatant une manifestation pour le moins originale :

Rapport.


J’ai l’honneur de rendre compte à Monsieur
le Commissaire Central que des élèves du Lycée ont
adopté la même coiffure que les étudiants et acheté des
bérets exactement semblables.

Aujourd’hui pour protester contre ce mode de
coiffure que les étudiants veulent se réserver à eux seuls,
ceux-ci se sont formés en groupe d’environs 200 et
sont allés attendre les élèves à la sortie du Lycée à 4 heures
du soir. Là, ils ont crié sur les élèves en les poursuivant
sur les quais. Arrivés au pont de Berlin, une
bousculade, sans être trop violente, s’est produite
entre étudiants et lycéens et le béret de l’externe
Haméon, âgé de 16 ans, demeurant chez ses parents
rue Chateaurenault, 4, a disparu ; il suppose
qu’il a été jeté dans la rivière.

La police a fait dissiper ce rassemblement
qui se composait à ce moment d’environ 300
personnes rue de Berlin.

Des renseignements que j’ai pu recueillir
après avoir rétabli l’ordre, il résulte que depuis
hier matin, une cinquantaine de Lycéens (externes et
internes) portent le béret qui n’a aucune distinction
de celui des Facultés. Ce matin, M. le Proviseur,
prévoyant sans doute une protestation de la part des
Etudiants, aurait engagé les élèves à faire disparaître
les rubans de diverses nuances et à ne laisser autour
du béret, que le petit galon doré. Les élèves s’y
sont conformés mais malgré cela, les étudiants
voulant absolument qu’il n’y ait qu’eux à
porter cette coiffure comme l’exigent leurs
camarades des autres villes, demandent à ce que
les élèves en adoptent une autre complètement
distincte de la leur ; ils déclarent vouloir recommencer
leur manifestation tous les jours jusqu’à ce qu’ils
obtiennent satisfaction.


Rennes, le 19 février 1889,

L’Inspecteur de police,


signature

Un détail est à noter : l’existence attestée des « rubans de diverses nuances » autour du béret. Celui-ci, en effet, comprend un large bord sur lequel est fixé un ruban de couleur. Et chaque discipline universitaire a sa couleur. Nous y reviendrons.

En mars 1912, dans le journal Le Cri des Ecoles [2], un article titré « Et nos bérets ? » lance un appel pour qu’ils soient reportés par les étudiants rennais. C’est donc qu’à cette date, le béret ne coiffe plus les étudiants mais n’est pas complètement tombé dans l’oubli. Et l’appel est entendu puisque le numéro suivant du Cri [3] annonce :

« V’là l’béret !

A la bonne heure ! Voilà qui fait bien augurer de l’avenir ; à peine notre appel avait-il eu le temps d’être entendu aux quatre coins de la ville qu’on lui répondait déjà avec enthousiasme.

Le premier pas est fait, encore un petit effort et il ne sera pas un seul escholier qui n’ait son béret. Ils sont déjà presque une centaine ; demain, ils peuvent être mille.

Décernons un bon point aux camarades du P.C.N. Les premiers ils ont arboré la “ bouze ” et nous savons qu’ils recrutent activement des adeptes autours d’eux, parmi leurs camarades des autres Facultés.

Retardataires ! Hésitants ! rendez-vous immédiatement chez votre chapelier (voir adresses à la 4ème page du Cri) commandez-lui un béret et arborez-le crânement samedi à la Retraite aux flambeaux, dimanche à la Cavalcade, et les jours suivants... »

Et en première page de ce même numéro 18, un dessin représente un étudiant en sabots, coiffé du béret et fumant la pipe devant l’hôtel de ville de Rennes.

Après la guerre, L’A, dès sa première parution, nous offre des mentions du béret estudiantin. La première, dont nous avons déjà parlé, saute aux yeux dès l’entête : c’est le dessin du monôme des dix étudiants. Nous trouvons aussi le compte-rendu du congrès de l’Union Nationale des Associations d’Etudiants de France. Il a lieu à Strasbourg où les « bérets français de velours noir au ruban de soie rouge, rose, bleu, violette, jaune, blanc, vert, réalisaient un coloris brillant, original et pittoresque [4] ». Mais les Français ne sont pas les seuls à posséder une distinction vestimentaire. Les étudiants étrangers venus en délégations portent leur propre attribut :

« A côté des Ecossais en costume national, jambes nues et jupe traditionnelle, c’étaient les Suisses aux larges bérets noirs ornés d’une épaisse plume blanche, gracieux panache qui leur donnait un air presque féminin. Puis venaient les Anglais, délégués de la Faculté de théologie protestante, en robe noire, les Polonais en uniforme gris-vert assez semblable à celui de uhlans, les Norvégiens, coiffés d’une barette noire au gland battant la joie, les Belges, un bonnet d’astrakan, etc. »

Mais revenons à Rennes et aux couleurs des rubans circulaires du béret noir. On pourrait penser qu’étant national, le béret estudiantin répond à des normes nationales. Pourtant, certains détails le concernant sont fixés à l’échelon local. C’est ainsi que, le 19 janvier 1923, lors d’une séance de délibération, l’Association Générale des Etudiants Rennais règle un litige opposant les étudiants des beaux-arts et ceux d’architecture. « Après longue discussion on adopte pour les Beaux-arts le ruban bleu actuel avec passepoil d’argent en haut et en bas. La masse d’Architecture reste avec le bleu actuel. Admis à l’unanimité [5]. »

Outre l’information sur la couleur de deux disciplines, ces quelques lignes soulignent le rôle que joue l’Association dans les décisions concernant la coiffure traditionnelle. Et les statuts de l’A.G.E.R. de 1923 le confirment. Sous le titre de chapitre « insignes », l’article 46 stipule que « tout étudiant qui s’inscrit à l’Association a droit au port du béret ceint d’un ruban dont les couleurs doivent être conformes au modèle fixé par une délibération du Comité. » Est-ce à dire que ceux qui n’adhèrent pas à l’Association Générale ne peuvent pas porter le béret ? Toujours est-il qu’une fois encore, l’A.G. se veut incontournable dans la gestion des questions, de toutes les questions, concernant les étudiants. Quant aux couleurs, quelles sont-elles ? Au début de l’année 1923, dans les colonnes de L’A [6],

« le comité de l’A.G. rappelle que les couleurs des rubans de béret des diverses corporatives ou sections sont les suivantes :

Droit : rose pompadour

Médecine : grenat

Sciences : rouge

Notariat : violet

I.P.B. : rouge et blanc (bandes horizontales)

Agriculture : rouge et vert (bandes horizontales)

Architecture : bleu

Beaux-Arts : bleu à double liseré argent

Pharmacie : vert

Lettres : jaune

Les élèves des grandes Ecoles portent un calot noir à passepoil rouge, avec un X en or. »

Ces couleurs de rubans circulaires sont donc celles retenues à Rennes. Mais elles sont aussi, du moins pour une part d’entre elles, en vigueur dans d’autres villes universitaires. En effet, les rencontres entre étudiants français, lors des congrès de l’U.N.E.F. notamment, entraînent sans doute une certaine uniformisation du béret. Cependant, aucune codification stricte n’existe.

Et c’est la porte ouverte aux changements de couleurs et aux contestations. C’est le cas en janvier 1930, quand le délégué de l’école d’architecture intervient lors d’une séance de délibération de l’Association Générale de Rennes [7] :

« Briand prend la parole au sujet de la couleur du ruban de béret des Archis sur le blason de la salle des fresques. Léon défend la couleur “ sable ”, couleur symbolique de l’architecture. Briand prétend avoir seul le droit au bleu pâle et demande cette couleur sur le blason au lieu du noir traîtreusement employé par les élèves des Beaux-Arts qui en sont les auteurs. Avis favorable du comité pourvu que l’Architecture prenne à sa charge les modifications et en garantisse l’intégrité artistique. »

Notons que Léon, étudiant en droit et président de l’A, emploie, selon toute vraisemblance, le terme « sable » dans son sens héraldique : il désigne alors la couleur noire et non du beige clair. Mais d’où lui vient cette information ? Pour répondre, nous pouvons imaginer que des élèves d’architecture d’autres villes portent le noir comme couleur de filière. Mais ce n’est pas sûr.

En plus des couleurs, des insignes viennent préciser l’appartenance de l’étudiant à telle ou telle corporation ou discipline. Mais il est difficile d’en cerner l’origine dans le temps et il faut être attentif au moindre indice. A la fin de la liste des couleurs ci-dessus, précision est donnée d’un insigne, le X en or des élèves des grandes Ecoles. Pourquoi alors ne pas donner la description des insignes des autres disciplines s’ils existent ? Peut-être parce que les insignes sont connus par tous et, de ce fait, n’appellent ni précision ni contestation, ce qui ne serait pas le cas des couleurs. Alors, quels sont ces insignes ?

Dans L’A du 10 mars 1926 [8], nous trouvons le dessin d’un visage d’étudiant coiffé du béret. Ce n’est certes pas le premier dessin d’étudiant en béret que L’A propose, mais celui-ci possède une précision intéressante. Le béret porte sur le velours, juste au-dessus du ruban circulaire, une balance. On peut affirmer, sans grand risque d’erreur, qu’il s’agit là de la représentation d’un étudiant en droit portant l’insigne de sa discipline, à savoir la balance de la justice. En effet, le juriste du monôme d’en-tête de L’A porte, à la main, la même balance.

Pourtant, le dessin du béret à la balance est repris en juin 1926 [9] pour illustrer le compte-rendu de la balade du notariat. Cela veut-il signifier que les étudiants en notariat arborent aussi cet insigne ? Ou tout simplement, était-il plus commode d’utiliser un dessin déjà existant pour représenter un étudiant sans trop se soucier de la valeur de l’insigne.

Dans le numéro d’avril 1926 de L’A [10], le célèbre Colas-Pelletier est représenté ceint de l’écharpe de président de l’A.G.E.R. et tenant un journal L’A et son béret. Ce dernier porte une tête de mort sur deux fémurs croisés qui est donc l’insigne des étudiants en médecine puisque Colas-Pelletier en est un. Notons que le dessin, signé Morisot, est daté de juin 1924.

En 1933 [11], une série de dessins, légendés et signés par Quito, a pour sujet les insignes. Y sont mentionnés le serpent du caducée et la dent, vraisemblablement insignes respectifs des potards et des dentaires. La « balance juridique » et « les cornues scientifiques » sont explicitement attribués par leur qualificatif. Le dessin du « rapin », élève aux Beaux-arts devant sa toile, est accompagné d’un té et d’une équerre qui sont peut-être ses insignes. Mais si l’on se réfère au dessin d’en-tête de L’A, l’élève en architecture porte sous le bras un té et une équerre. Dans la mesure où élèves aux beaux-arts et en architecture fréquentent à Rennes la même école, on peut penser qu’ils partagent aussi le même insigne. Ils se distinguent tout de même, nous l’avons vu, par leur ruban de béret. Enfin, le dernier insigne est une faux dont nous n’avons pas la véritable signification pour l’époque. Sa légende propose simplement de lui donner une autre attribution en demandant pourquoi « tous les étudiants [n’auraient-ils pas] LA FAUX les 15 derniers jours du mois ? »

En mai 1936, un article paru dans L’A souligne le fait que les insignes corporatifs ne sont pas forcément fixés sur le béret et que les étudiants n’ont pas le monopole des signes distinctifs [12] :

« Depuis l’apparition des nouvelles [sic] insignes de la corporation médicale, les P.C.B. (qui anticipent un peu) et les carabins, se voient en somme jouer le rôle de trains, si l’on considère les regards effarés des pékins vers les boutonnières des étudiants. Et l’on entend trop souvent, hélas ! : “ Encore une croix de feu ! C’est un camelot ! ” avec le dédain que l’on rencontre dans certains milieux. Cela va plus loin encore. Plusieurs camarades se sont vus injuriés publiquement ou même victimes de coups [...].

Mais renseignez-vous donc avant d’agir, et apprenez à reconnaître les insignes corporatifs avant que de les assimiler aux insignes politiques. Les juristes portent la balance, les khâgneux, la chouette, les taupins n’abandonnent pas leur X. Eh bien ! les carabins et les P.C.B. porteront “ la tête de mort ” avec la même fierté qu’auparavant. »

Progressivement, les insignes se diversifient et se multiplient. Ils ne désignent plus simplement les disciplines universitaires mais peuvent représenter l’Association Générale. Ainsi, en 1925, le comité de l’A.G.E.R. se vote un insigne. Au congrès de Pau, en 1933 [13], les « échanges d’insignes étaient une grande occupation et en partant les délégués en avaient chacun une bonne trentaine ; la loi de l’offre et de la demande se faisait là encore sentir une fois de plus. C’est ainsi que la cigogne de Nancy et l’insigne du Rennes-Etudiant-Club, dont le nombre était limité, avaient la grosse cote. » Nous voyons ici qu’un insigne peut représenter le club sportif auquel l’étudiant appartient ou sa ville. Mais il peut aussi être le résultat d’un échange. L’insigne prend alors un sens que seul son nouveau possesseur connaît : souvenir de la personne avec qui s’est fait l’échange, souvenir du lieu ou simple valeur esthétique ou matérielle...

Les insignes de discipline se multiplient aussi, ce qui permet de nouvelles précisions. Le texte qui suit en est un exemple :

« [On dit] que de mon temps, les P.C.B. n’avaient pas le droit de porter l’insigne de médecine, même à l’envers. Le Petit Cochon Blanc est-il donc détrôné ? Les carabins - les vrais - ne trouvent plus à acheter l’insigne de leur corpo. P.C.B., si vous voulez éviter la réquisition, n’affichez pas cette distinction illégale ! »

Bien que cet article soit daté de mai 1945 [14], osons le considérer valable pour les dernières années précédant la guerre. En effet, la précision « de mon temps » laisse penser que son auteur a connu l’Université avant cette année 1944-1945. Le texte est à rapprocher de celui de mai 1936, cité plus haut, qui donne la « tête de mort » comme insigne des carabins mais aussi des P.C.B. Quelques années plus tard donc, le « cochon » permet de distinguer les seconds des premiers.

Un autre insigne est porté sur le béret et plus précisément sur le ruban circulaire. Il s’agit de l’étoile. Elle correspond à une année universitaire effectuée par l’étudiant. Il est ainsi facile, d’un simple coup d’œil, de différencier un bizuth à une étoile d’un ancien à quatre ou cinq étoiles. La question est de définir précisément à quel moment cet insigne est apparu à Rennes. Dans L’A, les photos d’étudiants en béret sont rares et leur médiocre qualité rend très difficile la lecture de tels détails. Ce n’est qu’en 1938 [15] qu’un dessin atteste de l’existence d’insignes sur le ruban circulaire. Cependant, l’imprécision des traits empêche de conclure avec certitude qu’il s’agit bien d’étoiles. Le dessin représente aussi des insignes placés sur le velours.

Après la Seconde Guerre mondiale, des textes parus dans L’A font référence aux étoiles, mais aussi à d’autres caractéristiques de la faluche. Nous semblons dépasser alors la limite de notre étude. En fait, nous n’allons retenir que les éléments relatifs à la période de l’entre-deux-guerres. Ainsi, en février 1945, un article « à propos de la faluche [16] » est signé du président de l’A.G.E.R., F. Le Goux. L’auteur y mentionne « la photo du Comité de l’A.G.E.R., année 1923 - l’année de Colas-Pelletier - ». Le Goux est « frappé de la sobriété des faluches d’alors : une étoile par année ; le ruban de délégué pour le Comité ; les quatre rubans réglementaires pour les présidents de corpo. C’est tout : aucune breloque, aucune fanfreluche ». Ce document attesterait donc de la présence des étoiles en 1923. En outre, il évoque une distinction réservée à quelques-uns des porteurs de bérets : les rubans.

Illustration 4
Prosper Lebizu, étudiant - La Faluche (Histoire sans parole)

(L’A n° 10 jeudi 16 juin 1938, p. 4)





Des rubans, nommés aussi traversières, sont portés par les délégués et les présidents de corporation. Placés sur le velours, ils le traversent de part en part. Des dessins de 1924 [17] représentent des bérets dotés d’un tel ruban. Mais quelle en est la couleur ? Les délégués portent-ils tous la même qui représenterait l’Association Générale ? Les présidents de corpo portent-ils la couleur de leur discipline et celle de délégué, les deux autres rubans pouvant être blanc et noir, couleurs de Rennes ? Difficile de répondre. Le président de l’A.G.E.R., quant à lui, porte sur son béret un large ruban composé des couleurs de toutes les disciplines et de celles de la ville de Rennes [18]. On devine ce ruban présidentiel sur la photo du carnaval de 1938 paru dans L’A [19]. Mais, une fois encore, le manque de document empêche d’établir avec précision l’origine de ces distinctions.


Enfin, une autre question dont la réponse pose problème est celle du port du béret. Est-il « vissé » quotidiennement sur la tête de tous les étudiants ou n’est-il arboré que ponctuellement, lors de circonstances particulières et par une fraction seulement des étudiants ? Reste-t-il en vigueur pendant toute la période de l’entre-deux-guerres ou connaît-il des moments d’abandon ? Quelques textes permettent de répondre au moins partiellement à ces interrogations.

En juin 1921, la balade de fin d’année de l’Association Générale prend le train. « Les wagons vomissent cent cinquante bérets [20] » à Dinan. Voilà donc une occasion de porter le couvre-chef estudiantin. L’article 47 des statuts de 1923 est plus précis : « Le port du béret est obligatoire dans les fêtes et manifestations où l’Association agit officiellement ». L’obligation est claire mais rien ne prouve qu’elle soit respectée, d’autant plus qu’elle n’est qu’occasionnelle. C’est peut-être ce qui explique qu’il faille parfois rappeler aux étudiants de porter la coiffure traditionnelle. Ainsi en 1925 [21], le président Colas-Pelletier lance cet « appel aux étudiants » :

« Les délégués des plus grandes villes universitaire seront dans nos murs pour la réunion du bureau de l’Union Nationale du 31 janvier au 5 février.

[...]

Il est nécessaire que les étudiants rennais montrent à tous qu’à Rennes, les étudiants sont des types énormes !!!

Tous en béret pendant 5 jours.

A la gare en monôme, le samedi à 14 h. 41.

Tous animés du plus pur esprit estudiantin et la chanson aux lèvres. »

En mai de la même année, la balade de fin d’année de l’Association doit prendre la direction de Nantes. L’A [22] précise pour l’occasion : « Prière très instante de porter le béret ». En mai 1928, toujours pour annoncer la balade de fin d’année, on peut lire que « le port du béret est spécialement recommandé. Les sifflets et mirlitons seraient de bon goût, de même que la correction à l’égard des chauffeurs auxquels il est particulièrement recommandé de ne pas payer à “ boire ” [23] ».

Mais ces rappels répétés sont sans doute suivis différemment selon la corporation à laquelle on appartient. Les littéraires, par exemple, ont la réputation de rester en retrait de la vie estudiantine rennaise. Ils sont, par là même, peu enclin à porter le béret de velours [24]. En 1929, un étudiant en lettres signe le compte-rendu de la balade de fin d’année de l’A. Il apporte un nouveau témoignage de la rareté des « jaunes » lorsqu’il décrit le rassemblement qui précède le départ de Rennes : « Peu à peu apparaissent les différentes couleurs : rouge, vert, bleu et jaune (oui Monsieur : jaune ; la race n’est pas encore éteinte, et j’en sais qui portent la couleur – si symbolique soit-elle – avec une triomphale dignité) [25] ».

Monômes, bals, réceptions, fêtes de la Mi-Carême, balades sont donc autant d’occasions de porter le béret de velours. Les congrès en sont d’autres. Mais là, le béret peut être remplacé, sur la tête d’un Rennais, par un chapeau breton. C’est le cas en 1933 à Pau, nous l’avons vu précédemment [26]. De ce congrès, le compte-rendu de L’A nous apprend aussi que les bérets « des Lillois tiraient sur le vert, car c’est, contrairement à la plupart des autres facultés, la coiffure habituelle. »

Mais en 1936, plusieurs articles parus dans L’A nous laissent penser que le couvre-chef des étudiants est passé de mode. De « propos » publiés dans le journal Strasbourg-Université et relatifs au « déclin du mysticisme estudiantin » est extraite cette conclusion [27] :

« Partout en France, il y a quelques années à peine, primait le béret de velours aux rubans multicolores et aux nombreux insignes !

Aujourd’hui, tout cela tend à disparaître. Pourquoi ? Par le manque d’intérêt que l’étudiant porte aux manifestations de la vie estudiantine.

Aujourd’hui, l’étudiant veut se donner un genre “ sérieux ”, en faisant abstraction du genre “ Bohême ” qu’il porte inné en lui, puisqu’il est jeune.

Nous aimons tous voir sur l’écran les bohémiens tziganes ivres de leur liberté. Pourquoi ne serions-nous pas des bohémiens à notre façon, des bohémiens étudiants ?

Remettons en honneur notre vieux béret, adjoignons-lui même des cannes en bambou si nous le voulons. Etudiants, rigolons et chantons.

Soyons nous-mêmes. »

Sur le même thème, en décembre 1936, dans sa « revue de la presse estudiantine [28] », L’A cite son confrère nantais La Bohème de novembre 1936 : « [...] ce numéro contient une Défense de la Faluche, par Frère Jean des Entommeurs. Puissent les autres journaux estudiantins imiter la Bohème dans ce sens ! » Et L’A [29] donne l’exemple en publiant un article sur « la résurrection de la faluche ».

Mais avant d’aller plus loin, ouvrons une parenthèse pour souligner cette première mention, dans nos sources, du mot faluche. Ce terme est vraisemblablement originaire de la région lilloise où il désigne une sorte de pain rond ou « galette ». Par analogie, il désigne le béret de velours noir des étudiants. Un étudiant rennais le nommait bien « bouze » en 1912 ! L’influence des Lillois ne doit pas étonner, puisque la faluche est pour eux « la coiffure habituelle ». Mais de quand date cette dénomination ? Son apparition tardive dans nos sources laisse penser qu’elle est plutôt récente : cinq ans, dix ans, sans doute guère plus. En tout cas, le terme est désormais adopté.

Si à Rennes on parle de « résurrection de la faluche », c’est pour lancer un appel. Le béret n’est porté que lors des monômes, de la Mi-Carême ou des sorties. Et même en ces occasions, tous les étudiants ne l’ont pas. Certains souhaiteraient donc voir Rennes suivre l’exemple de Lille et donner « à la Faluche une place qu’elle mérite ». Le message est reçu. En effet, quinze jours plus tard, toujours dans les colonnes de L’A [30], « un ruban jaune », se réjouit que la faluche soit... « renée », que les étudiants n’aient plus honte d’elle et la portent dans les rues de Rennes. Et il poursuit :

« Remercions-en les bizuths juridiques, qui ont lancé le mouvement pro-faluchard, le jour même où l’A paraissait. Chose étrange, et que je dois proclamer, la campagne de presse et la manifestation juridique étaient absolument indépendantes, je dirai même ignorantes l’une de l’autre. Ceci pour prouver que le port de la Faluche était une revendication générale. »

Mais l’enthousiasme va être de courte durée car, dès le mois de janvier, le béret estudiantin passe de nouveau plus de temps au placard que sur la tête de ses propriétaires [31]. Un an après, en janvier 1938 [32], « un Dur à Cuir » rappelle que la faluche n’est pas « un vague couvre-chef que [l’on porte] les jours de monômes, pour [se] distinguer entre Corpos, et qui le reste du temps reste enfermée au fond d’un tiroir où elle sert de pâture aux mites ». Le port de la faluche doit être régulier pour permettre à l’étudiant de se distinguer du « pékin ».

D’après ces divers exemples, il semble possible de conclure que le béret a pu être arboré régulièrement à Rennes, au moins par une partie des étudiants. Néanmoins, sur l’ensemble de la période 1919-1940, il apparaît que la coiffe estudiantine n’est portée que lors de circonstances particulières, comme le préconisent d’ailleurs les statuts de l’Association Générale. Dans un cas comme dans l’autre, l’attrait qu’exerce la faluche sur les étudiants varie selon les individus, les corporations et les années.

B. La bannière de l’Association Générale et les écharpes

Le 20 décembre 1919, le premier monôme d’après-guerre s’ébranle. « Alors, très digne, apparaissait la bannière de l’A, et le bureau tout entier, en frac, en tube, écharpé aux couleurs nationales, et les présidents des “ Corpo ” écharpés aux couleurs correspondant à leur Faculté [33] ». Si cette description sert d’introduction, c’est parce qu’elle appelle plusieurs remarques. Nous mettrons ainsi un lien entre le béret étudiant et les costumes et écharpes des représentants d’associations. Mais commençons par évoquer la bannière.

Elle est donc sortie pour ce premier monôme d’après-guerre de l’Association. Mais, elle semble quelque peu défraîchie car un appel « aux midinettes » est passé dans les colonnes de L’A en février 1920. Les « petites ouvrières » sont sollicitées pour broder une nouvelle bannière [34]. En 1926, il en faut une nouvelle et c’est par « acclamation que les délégués votent l’achat d’une bannière pour l’Association des Etudiants de Rennes  [35] ».

Cette bannière, symbole de l’Association Générale, revêt une importance comparable au béret puisque, comme lui, elle trouve place dans les statuts de l’A.G.E.R. de 1923 [36]. Dans ces derniers, l’article 48 stipule que « la bannière de l’Association ne peut être déployée qu’après vote du Comité et autorisation du Commissaire de Police ». Mais, l’autorisation du Commissaire n’est sans doute pas nécessaire lorsque la bannière voyage.

Car elle voyage. En 1929, par exemple, elle est au congrès de Toulouse [37]. « Toutes les Associations défilèrent, drapeau en tête, au son de plusieurs musiques. Le drapeau de l’A.G.E.R. était crânement porté par notre ami Kernéis que l’on avait choisi

Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille… »

En mai 1933, les étudiants rennais sont en grève. Lors de la manifestation du 4, « le drapeau de l’Association est déployé ». Ces exemples nous donnent une idée des circonstances dans lesquelles la bannière de l’Association Générale de Rennes peut être déployée. Ces circonstances revêtent un caractère officiel voire même solennel. Le vote du Comité et l’autorisation du commissaire de police, préalables à la sortie du drapeau, soulignent d’ailleurs la dimension officielle. Et ils font de cette sortie un moment exceptionnel.


Outre la bannière qui la représente lors de certains défilés, l’A.G.E.R. possède ses armes à partir de 1928. Elles sont l’œuvre de M. d’Haucourt, professeur de droit et conseiller à la Cour d’appel de Rennes. L’homme a été l’un des promoteurs de l’Association Générale et il y est parfois invité pour faire des conférences aux étudiants [38]. En janvier 1928, il parle de La Chalotais et des rapports des Etudiants avec la police au XVIIIe siècle [39]. Mais ce n’est pas tout :

« M. d’Haucourt ne vint pas rue Saint Yves seulement en conférencier. Sa sollicitude pour l’Association Générale lui a inspiré un projet : très versé dans l’art héraldique, il a voulu que l’A.G. eût ses armes et qu’elles fussent peintes sur les murs de sa maison comme il convient. Il nous en livra l’autre soir la maquette : au centre, l’écharpe violette de l’A coupe les armes de Rennes et de la Bretagne ; tout autour on peut voir les armes des différentes corporations : droit, sciences, pharmacie, médecine, lettres, agriculture, grandes écoles, architecture, beaux-arts. Comptez : vous trouverez le chiffre neuf, et M. d’Haucourt l’a ainsi choisi en souvenir des neufs muses.

Mais à toute armoirie il faut une devise. M. d’Haucourt en a trouvé une et elle s’impose “ Age quod agis ”. Le jeu de mots A.G. n’est pas en conformité avec les exigences de la grammaire héraldique et le conseil ne laisse pas d’être excellent. [...] »

Dans le texte ci-dessus, un détail nous ramène au monôme de 1919 dont nous parlions plus haut : l’écharpe. Le texte précise qu’il s’agit de « l’écharpe violette de l’A ». Or nous avons vu qu’en 1919, les membres du bureau de l’A.G. de Rennes étaient écharpé « aux couleurs nationales », c’est-à-dire, selon toute vraisemblance, bleu, blanc, rouge. Il y a donc eu changement. L’écharpe portée par le président de l’A.G.E.R. est désormais violette. Un article de L’A, relatif à la grève du 4 mai 1933, nous le confirme. Ce jour-là, les étudiants défilent « groupés derrière leur Comité aux bérets surchargés d’insignes, derrière l’écharpe violette de Lejeune et l’écharpe rouge de Chapel ». Lejeune est alors président de l’Association Générale des Etudiants Rennais et Chapel président de la corporation du droit.

Par ailleurs, l’attribut présidentiel se transmet d’un président à l’autre lors de la passation de pouvoir. Le 19 janvier 1926, par exemple, Colas-Pelletier, après presque quatre ans passés à la tête de l’A.G.E.R., remet l’écharpe présidentielle à Asse, élu président le soir même [40]. Quant aux lignes suivantes, extraites d’un article d’avril 1931 [41], elles nous apprennent le départ de Le Gentil, président de l’A. « Dans quelques jours, il reviendra passer l’écharpe à son successeur et repartira à jamais, emportant dans sa poche, à titre de consolation, le diplôme de président honoraire qu’il pourra faire encadrer ! »

Au sein de l’A.G.E.R., d’autres personnages portent une écharpe. Ainsi, les vice-présidents en sont dotés à partir d’un vote du comité en décembre 1924 [42]. Puis les « Généraux » ont aussi droit à la leur, en février 1925 < [43]. A ce titre, le commissaire des fêtes porte l’écharpe. Mais peut-être ne s’en pare-t-il que le jour des fêtes de la Mi-Carême qu’il a la charge d’organiser. Une photo de 1938, dont nous avons déjà parlé, montre ce commissaire et son écharpe.

Quant aux présidents des différentes corporations, ils arborent également, en certaines occasions, une écharpe. Sa couleur est celle de la corpo, de la discipline : rouge pour le droit, par exemple. Et il y a là un lien évident avec le béret estudiantin. La couleur du ruban circulaire de ce dernier est identique à celle de l’écharpe et donc de la discipline. Cette couleur disciplinaire est d’ailleurs aussi arborée sur la toge par les professeur d’Université. Et le rapprochement doit être fait entre les écharpes et les traversières qui ornent les bérets des présidents ou des délégués. Tout indique, en effet, qu’un glissement s’opère des unes vers les autres.

Ainsi, toujours lors du monôme de 1919, apparaît « le bureau tout entier, en frac, en tube, écharpé aux couleurs nationales ». En 1921, le journal L’A montre « ce que fut le Mardi-Gras [44] » à l’aide de photographies. On y voit le président de l’A.G.E.R. en costume et chapeau haut-de-forme, ceint de l’écharpe. En 1927, une tenue présidentielle identique, mais dessinée cette fois, apparaît dans L’A [45].

A grande occasion, grande tenue : le président de l’Association ne porte pas le béret et l’écharpe indique sa fonction. Par la suite ou en d’autres occasions, le béret doté d’une traversière coiffe le président, le membre du bureau ou le président de section de l’Association Générale. Outre son port plus pratique que le haut-de-forme et l’écharpe, le béret symbolise l’étudiant. Et la traversière joue le même rôle que l’écharpe en indiquant la fonction de son propriétaire. Mais les deux peuvent encore être arborées simultanément.



Dans cette partie consacrée au folklore estudiantin, il aurait été possible de multiplier encore les récits de congrès, de chahuts ou de fêtes, les anecdotes réelles, enjolivées ou totalement imaginaires. L’A, « le premier journal du monde (par ordre alphabétique) » en contient des dizaines. Mais c’est par centaines et même plus que les expériences sont vécues individuellement par les étudiants. Mises bout à bout, elles composent « l’esprit estudiantin ».

La dimension folklorique, nous l’avons répété, fait partie intégrante du mouvement associatif et corporatiste des étudiants de l’entre-deux-guerres. Elle en complète l’aspect utilitaire. Cette dimension est ancienne mais a peut-être trouvé une raison supplémentaire d’exister. Elle permet à la jeunesse des écoles d’exorciser ses souvenirs de guerre, ses difficultés quotidiennes et sa crainte de l’avenir.



CONCLUSION


De 1919 à 1940, le mouvement associatif des étudiants français se révèle particulièrement actif. Il présente plusieurs caractéristiques qu’il est possible de résumer par un terme : le corporatisme. L’Association Générale des Etudiantes et Etudiants Rennais offre un exemple de ce corporatisme estudiantin de l’entre-deux-guerres.

Le mouvement associatif plonge ses racines dans les dernières années du XIXe siècle. Alors que l’enseignement supérieur émerge véritablement, les étudiants prennent conscience qu’ils forment un corps. Ils éprouvent alors logiquement le besoin de renforcer les liens qui les unissent et d’entretenir ce corps. Pour ce faire, dans chaque ville universitaire, les étudiants des différentes facultés se réunissent au sein d’une Association Générale. Celle des étudiants rennais voit le jour en 1887. Elle ne semble cependant pas réussir à maintenir la cohésion de la jeunesse des écoles. Cette dernière ne retrouve un début d’unité que vers 1910, notamment autour de son Foyer.

Après la Première Guerre mondiale, l’A.G.E.R. (re)naît. Le conflit que les étudiants ont vécu les a marqués et leur a donnés une maturité nouvelle. Ils ont pour but, comme avant-guerre, de se regrouper. Mais cette fois, la solidarité et l’entraide apparaissent presque vitales. Elles permettent aux étudiants de surmonter ensemble les difficultés matérielles du quotidien et la crainte de l’avenir. A Rennes et ailleurs, les membres des Associations Générales s’activent pour obtenir aides et avantages matériels et financiers. Dans une atmosphère paternaliste, ils s’entourent du soutien des autorités municipales ou universitaires.

Au-delà de l’échelon local, l’Union Nationale des Associations d’Etudiants de France bénéficie alors d’une véritable participation des Associations Générales qui la composent. Ce n’était pas le cas avant la guerre. Et l’U.N. bénéficie de la reconnaissance des autorités gouvernementales et de leur aide. Les réalisations en faveur des étudiants se multiplient alors : bourses, restaurants, cités universitaires, sanatorium…

Les intérêts estudiantins sont désormais mieux pris en compte et les étudiants peuvent, dans une certaine mesure, participer aux réformes universitaires qui les concernent directement. La défense de leurs intérêts est d’ailleurs au cœur de leur mouvement associatif. Il entraîne un changement de ton sensible vers la fin de la période. Les vœux polis et respectueux communiqués aux autorités ne sont plus toujours entendus. Le recours à la grève est alors une solution. Et un syndicalisme estudiantin est déjà en germe. Il faut cependant souligner que l’apolitisme prôné par leur mouvement permet aux étudiants de s’adresser aux autorités quelles que soient leurs appartenances idéologiques. Mais il est avant tout une garantie pour la cohésion du mouvement, à l’U.N.E.F. comme à Rennes.

Cependant, les étudiants ne restent pas prostrés dans une attitude sérieuse et préoccupée. L’esprit estudiantin est joyeux. L’A.G.E.R. propose à ses membres toute une série de distractions. Elle fait vivre dans ce domaine un héritage de la période d’avant-guerre, période « folklorique » comme elle est parfois qualifiée. Au-delà des chahuts et des monômes plus ou moins indisciplinés, il est même proposé aux étudiants de l’A de Rennes d’organiser des festivités. Parmi celles-ci, la plus remarquable est sans conteste le carnaval de la Mi-Carême. Mais elle ne doit pas occulter les autres manifestations dues à l’humour et à la jeunesse des étudiants. Dans ce registre, il faut citer une réalisation exceptionnelle : L’A, le journal de l’A.G.E. de Rennes.

Le mouvement associatif et corporatiste des étudiants rennais est donc marqué, dans les années vingt et trente, par une assez large représentativité du milieu estudiantin, par la défense des intérêts de ce milieu, par une dimension nationale au sein de l’U.N. et par un caractère folklorique. Ces caractéristiques générales qu’elle partage avec les autres Associations Générales d’Etudiants de France, font de l’A.G.E.R. un exemple du corporatisme estudiantin de l’entre-deux-guerres.

Mais en 1939, la guerre est déclarée. Les Allemands entrent dans Rennes en 1940 et occupent les lieux de vie des étudiants. La Faculté de Droit, par exemple, est réquisitionnée. Les juristes suivent donc leurs cours parmi les statues du musée qui retrouve sa première fonction ou près d’un corps humain décapité et conservé dans un liquide à l’Ecole de Médecine [46]. La Maison de la rue Saint-Yves n’échappe pas à l’occupation et la vie associative des étudiants s’endort à nouveau.

En 1944, quelques étudiants relancent l’activité de l’A.G.E.R. et le succès est immédiat et massif. Le corporatisme reprend sa place mais par pour très longtemps. Les choses ont changé, le monde n’est plus le même. La politique prend de l’importance dans le milieu étudiant. Le syndicalisme qui perçait déjà avant la guerre, se développe. Bientôt, l’étudiant corporatiste, l’étudiant « folklorique », l’étudiant porteur du béret sera dépassé. La révolte de mai 1968 n’est pas loin.




[1] AMR - R 82 : Rapport de police 1889

[2] [sans auteur] « Et nos bérets ? », Le Cri des Ecoles N°17, 3 mars 1912, p. 1

[3] [sans auteur] « V’là l’béret ! », Le Cri des Ecoles N°18, 17 mars 1912, p. 2

[4] PREVOST L., « Le Congrès de Strasbourg », L’A n° 1 L.22 décembre 1919, pp. 1 et 2

[5] ADIV - 1 J 40 : Registre, séance du 19 janvier 1923

[6] [sans auteur] « Les couleurs corporatives », L’A n° 4 J. 25 janvier 1923, p. 8

[7] ADIV - 1 J 40 : Registre, séance du 8 janvier 1930

[8] L’A n° 6 Merc. 10 mars 1926, p. 3

[9] M., « La ballade du Notariat », L’A n° 12 Merc. 30 juin 1926, p. 2

[10] L’A n° 8 Merc. 21 avril 1926, p. 1

[11] L’A n° 11 J. 18 mai 1933, p. 1

[12] COLLIN H., « A propos d’insignes », L’A n° 10 J. 14 mai 1936, p. 12

[13] Quito, « Le congrès… et sa muse », L’A n° 10 J. 4 mai 1933, p. 8

[14] [sans auteur] « On dit », L’A n° 11 V. 4 mai 1945, p. 2

[15] L’A n° 10 16 juin 1938, p. 4

[16] LE GOUX F., « A propos de Faluche. Retour à la sobriété classique », L’A n° 7 J. 22 février 1945, p. 1 et ANNEXE 4

[17] L’A n° 12 J. 26 juin 1924, p. 1

[18] témoignage de M. Le Goux

[19] L’A n° 7 J. 31 mars 1938, p. 3

[20] Jobic, « Balade en prose! », L’A n° 1 J. 1er décembre 1921, p. 3

[21] COLAS-PELLETIER, « Appel aux étudiants », L’A n° 4 J. 29 janvier 1925, p. 5

[22] PICQUENOT P., « Ballade de fin d’année à Nantes - Programme général », L’A n° 10 J. 14 mai 1925, p. 3

[23] [sans auteur] « Association Générale des Etudiants Rennais - Ballade de “l’A”. Année scolaire 1927-1928 », L’A n° 11 J. 31 mai 1928, p. 8

[24] G. (des Lettres) C. Lui, « A propos du Bal des Lettres », L’A n° 5 J. 7 février 1923, p. 8

[25] BOUYNOT Y., « La ballade de l’A », L’A n° 12 J. 13 juin 1929, p. 1

[26] Quito, « Le congrès… et sa muse », L’A n° 10 J. 4 mai 1933, p. 8

[27] LEROY M., « Revue de la presse estudiantine », L’A n° 8 J. 26 mars 1936, p. 9

[28] [sans auteur] « Aux confrères de l’A et aux lecteurs de l’A », L’A n° 1 J. 3 décembre 1936, p. 9

[29] M. L., « La résurrection de la faluche », L’A n° 1 J. 3 décembre 1936, p. 2

[30] Un ruban jaune, « Renée », L’A n° 2 J. 17 décembre 1936, p. 3

[31] M. L., « Renée se meurt. Renée n’est pas morte... », L’A n° 4 J. 21 janvier 1937, p. 2

[32] Un Dur à Cuir, « La faluche », L’A n° 2 J. 20 janvier 1938, p. 9

[33] Le serre-file, « Le monôme du 20 décembre », L’A n° 2 L. 12 janvier 1920, p. 1

[34] [sans auteur] « Aux midinettes », L’A n° 5 L. 23 février 1920, p. 2

[35] ADIV - 1 J 40 : Registre, séance du 26 avril 1926

[36] PIV : Statuts et Règlement de l’A.G.E.R. 1923

[37] J. T., « Le Congrès de l’U.N. à Toulouse », L’A n° 9 J. 18 avril 1929, p. 4

[38] Copyright by Razaiou, « Les conférences de l’A », L’A n° 4 Merc. 10 février 1926, p. 4

[39] [sans auteur] « Les conférences de L’A », L’A n° 4 J. 26 janvier 1928, p. 7

[40] ADIV - 1 J 40 : Registre, séance du 19 janvier 1926

[41] [sans auteur] « A travers l’A.G.E.R. - Le président nous quitte », L’A n° 9 J. 30 avril 1931, p. 11

[42] ADIV - 1 J 40 : Registre, séance du 27 novembre 1924

[43] ADIV - 1 J 40 : Registre, séance du 9 février 1925

[44] [sans auteur] « Ce que fut le Mardi-Gras », L’A n° 6 J. 17 février 1921, pp. 1 et 2

[45] L’A n° 1 J. 15 décembre 1927, p. 3

[46] Témoignage de M. Piron